Dérivations

Pour le débat urbain

Occuper l’architecture, entretien avec Carmen Silva

Propos reccueillis par Thiago T. Abranches de Soverale et Cauè Capillé

Carmen Silva est le leader du MSTC, le Mouvement pour les Sans-Toit du Centre, à São Paulo, Brésil.

Dr. Thiago T. A. de Soveral est architecte et urbaniste, basé à Rio et Paris. Il est responsable de la gestion de l’architecture et du développement au BlendGroup ; coordonnateur de l’architecture à la Fundação Tide Setúbal (São Paulo/BR) ; consultant auprès de la Banque mondiale pour le logement social.

Dr. Cauê Capillé est professeur à la FAU (Universidade Federal do Rio de Janeiro) et au programme d’études supérieures en urbanisme (PROURB FAU UFRJ).

À l’heure actuelle, au Brésil, le déficit de logements ne diminue pas malgré la production constante de nouvelles unités d’habitation par le marché immobilier |1|.

Les politiques publiques chargées du logement sont toujours davantage déficitaires, dépassées par la situation ; les circonstances qui, il y a 25 ans déjà, poussaient des militants et des familles à occuper des immeubles abandonnés, se sont aujourd’hui largement aggravées. Les luttes urbaines et les actes de résistance sont dès lors des mécanismes importants pour garantir l’accès à un logement digne à nombre de familles.

Carmen da Silva Ferreira fait partie des leaders les plus importants de la lutte pour un logement décent dans le Brésil contemporain. Née en 1960 à Santo Estêvão (État de Bahia, dans le Nord-Est brésilien), fille d’une travailleuse domestique et d’un militaire, sa trajectoire est marquée par l’expérience directe des inégalités structurelles du pays. Elle a quitté Salvador en 1993 pour s’installer à São Paulo où elle a transformé son expérience d’exclusion en force mobilisatrice, devenant une référence nationale dans l’articulation des mouvements sociaux urbains.

En l’an 2000, forte de son expérience d’occupation de bâtiments publics abandonnés dans le centre-ville de São Paulo, Carmen, aux côtés d’autres femmes, a fondé le Movimento Sem-Teto do Centro (MSTC), le Mouvement des Sans-Toit du Centre. Parmi ces espaces qu’elle et ses collègues décidèrent d’occuper dans le centre, il convient de mentionner l’Occupation dite « du 9 juillet » (Ocupação 9 de Julho), en référence à l’avenue du Neuf juillet (avenida Nove de Julho), une avenue emblématique du centre-ville où se situe l’édifice. Cet ancien bâtiment public, abandonné depuis les années 80 et investi une première fois par des militants en 1997, abrite aujourd’hui 138 familles organisées en autogestion dans une infrastructure sûre avec des projets sociaux qui comprennent des ateliers, des renforts scolaires, des événements culturels, un potager, une galerie d’art, etc. Face aux défis qui concernent la question du logement au Brésil, l’Occupation du 9 juillet, devenue un modèle de citoyenneté active et de revendication pour le droit à la ville, fait aujourd’hui figure de référence et attire l’attention des architectes et des urbanistes.

Malgré le caractère illégal de certaines actions militantes, Carmen Silva a toujours été acquittée et son action en faveur d’un logement décent s’est par la suite élargie et diversifiée. Elle fut en 2016 la protagoniste et co-scénariste du film Era o Hotel CambridgeC’était l’hôtel Cambridge |2| ; elle a également reçu des prix prestigieux, notamment celui de l’APCA |3| et le prix ECOA |4| ; elle a enseigné dans des institutions renommées comme l’Insper et l’Escola da Cidade |5|. Depuis 2023, elle occupe la fonction de chef du Conseil de la participation sociale et de la diversité au Ministère du Développement, de l’Industrie, du Commerce et des Services. Malgré cette reconnaissance, Carmen et sa famille sont régulièrement la cible de diverses menaces, de persécutions et de dénonciations. Elle est de nos jours l’une des principales voix en faveur de politiques publiques du logement inclusives et participatives au Brésil.

Nous sommes heureux de présenter ici une interview inédite de Carmen Silva, réalisée le 2 avril 2025. Cet entretien est structuré en trois axes et permet de mettre en avant sa trajectoire de même que les défis de la lutte pour le logement au Brésil, en particulier à São Paulo. Dans un premier temps, nous reviendrons sur l’Occupation du 9 juillet à proprement parler ; nous réfléchirons ensuite sur les apprentissages générés par cette expérience et nous évoquerons la création du MSTC. Enfin, nous terminerons cet entretien par une réflexion plus large sur l’avenir des politiques du logement dans le pays.

Ce travail cherche non seulement à documenter et conserver la mémoire vivante des luttes urbaines, mais aussi à comprendre comment la pensée et les pratiques des mouvements sociaux en faveur d’un logement digne, animés par des femmes comme elle, redessinent les contours de la citoyenneté dans le Brésil contemporain.

TEMPS I – OCCUPATION

TS+CC
Comment l’idée d’occupation est-elle apparue ? Comment cette idée a-t-elle fait son chemin en vous ?

CS
Quand je suis arrivée à São Paulo, j’ai eu l’impression de débarquer dans un autre pays. Je me suis sentie comme une étrangère, une réfugiée dans mon propre pays. J’ai compris que, même si je parlais la même langue, même si j’étais née ici, il y avait un véritable choc entre les différentes régions du pays. Je me suis rendu compte que je devais tout recommencer à zéro. Ce nouveau départ nécessitait d’affronter les difficultés que l’État m’imposait à ce moment-là. Soit je retournais en arrière, soit j’affrontais les obstacles. Et j’ai choisi d’affronter. Je ne voulais pas faire marche arrière. [Carmen, mère de huit enfants, a déménagé à São Paulo pour fuir des violences domestiques.]

Dans ce combat que je menais, dans cette décision de rester, je me suis aussi rendu compte à quel point l’État – et j’ai fini par comprendre que ce n’était pas seulement à São Paulo – avait du mal à écouter ses citoyennes. L’État n’a pas de plan pour accueillir les gens comme moi, parce que, dans son fonctionnement global, il manque cruellement de politiques publiques efficaces. Quand une femme débarque dans un endroit qui n’est pas sa région d’origine, elle est quasiment condamnée à ne pas avoir de toit, à ne pas trouver de travail, à galérer avec tous ces problèmes de mobilité. Résultat, je suis restée à la rue. De la rue, j’ai trouvé refuge dans une auberge. C’est là que j’ai rencontré une personne qui faisait déjà partie du mouvement pour le droit au logement. Mais, à cette époque, dans les années 90, la question du logement était encore un grand tabou. Les seules références en la matière qu’on avait, c’étaient les mutirões |6| de Luiza Erundina [maire de São Paulo de 1989 à 1993] et les débuts du modèle de Cingapura [Singapour], de verticalisation de la favela |7|.

Mais, moi, personne étrangère, qui ne connaissais rien, qui n’avais aucune attache dans l’État de São Paulo, comment est-ce que je pouvais aborder, comprendre tout ça ? Je ne connaissais rien à la géopolitique spatiale, sociale ou territoriale de São Paulo – donc, forcément, je ne comprenais pas grand-chose, hein ! Je me sentais perdue, un peu étrange dans tout ça. C’est grâce au mouvement pour le droit au logement que je me suis rendu compte que, tant que je ne construirais pas de liens avec la ville, avec ce territoire – que je sois à São Paulo ou dans n’importe quelle autre ville – je me sentirais toujours un peu comme une étrangère, hors du nid. J’ai donc commencé à participer activement à des réunions, des conférences, des audiences publiques grâce auxquelles j’ai appris beaucoup de choses relatives aux politiques publiques et aux programmes de logement en vigueur. J’ai aussi commencé à assister aux réunions de partis politiques et j’ai commencé à prendre conscience de l’importance des partis. Un parti politique n’est pas seulement là pour les périodes électorales : il a aussi le rôle d’orienter les responsables publics élus pour qu’ils puissent prospecter et répondre aux besoins réels des citoyens.

TS+CC
Comment se sont déroulés les préparatifs de l’occupation du 9 juillet ? Combien de temps cela a-t-il pris ?

CS
Les critères du mouvement ont toujours été la participation active. Il y avait déjà les mutirões qui existaient, et j’ai commencé à participer aux actions des militants qui y étaient déjà engagés. Au fil de mon parcours à travers ces mutirões, j’ai commencé à réfléchir concrètement à la question du logement, à percevoir les avantages et les inconvénients liés à certains logements dans lesquels j’étais amenée à vivre. Ces lieux étaient souvent éloignés des zones d’emploi, sans entreprises à proximité. Comment pouvais-je me déplacer vers ces zones depuis une maison isolée ? J’ai commencé à remettre en question le transport, à interroger l’emplacement.

C’est de cette manière que nous avons commencé à discuter de l’occupation du centre-ville, du vieux centre, qui était complètement vide. C’était l’époque du mutirõa de l’Avenida Celso Garcia, dans le quartier du Brás, une référence en matière de mobilisation collective. Puis, l’organisation des « Quintais da Mooca », où l’on a mis en place des cortiços [des habitations collectives précaires], a également commencé. C’est dans ce contexte qu’est née la lutte pour l’occupation de l’ancien cinéma de la Mooca. C’est comme ça, qu’avec d’autres personnes, j’ai commencé à observer les bâtiments vides.

Nous avons aussi organisé l’occupation d’un bâtiment situé rue Pirineus, dans la zone surnommée « Cracolândia |8| » : le Casarão |9| Santos Dumont, qui donne sur le boulevard Cleveland. Dans cette même rue Pirineus, il y avait aussi un bâtiment appartenant à l’Université de São Paulo que des familles ont occupé : aujourd’hui, ce sont des logements permanents et les familles qui y étaient installées de façon précaire à l’époque sont finalement restées. Quant au Casarão Santos Dumont, il abrite aujourd’hui le musée de l’Énergie de São Paulo… C’est à peu près au moment où ce bâtiment a été réinvesti par les pouvoirs publics |10| qu’est né le projet Parque do Gato |11|, un programme de location sociale mis en place par la COHAB |12|. D’autres projets ont également vu le jour, cette fois sous la responsabilité de la CDHU |13|. Ensuite sont arrivés les programmes PAC-BID, qui visaient à intervenir dans les cortiços |14|. À ce stade-là, j’étais déjà en train de m’organiser, de mieux comprendre la législation et les rouages des politiques publiques.

En 1997, nous avons occupé le bâtiment de l’avenida 9 de Julho avec d’autres mouvements. [C’est là, sur la 9 de Julho, que s’est révélé le leadership de Carmen.] Cette occupation, à l’époque, a vraiment attiré l’attention – beaucoup d’attention même. Il s’agissait d’un bâtiment abandonné depuis vingt ans qui appartenait à une institution fédérale. À l’origine, c’était en effet la propriété de l’ancien IAPETEC |15|, puis il est passé entre les mains de l’INSS |16|. Ce qui était particulier avec ce bâtiment, c’est qu’il avait une double vocation : jusqu’au cinquième étage, c’étaient des bureaux administratifs et, à partir du sixième étage, c’étaient des logements destinés aux employés de l’IAPETEC. [Le bâtiment de l’avenue 9 de Julho, inauguré en 1943, compte 15 étages et constitue un exemple emblématique de l’architecture art déco de la ville de São Paulo.]

[Quand nous avons occupé le bâtiment], nous avons retrouvé une quantité énorme de documents dans les anciens bureaux. Nous avons alors appelé la presse et remis l’intégralité de la documentation de l’INSS – des dossiers venant de tout le Brésil. C’étaient les documents de personnes dans le besoin qui avaient fait des demandes à l’INSS. Ensuite, nous avons fait face à plusieurs gouvernements, notamment celui de Fernando Henrique Cardoso |17|, celui de Celso Pitta |18|, celui de Mário Covas |19| et celui d’Orestes Quércia |20|. Cette période a vraiment permis à notre lutte de se définir : une lutte pour montrer que l’État, que le gouvernement fédéral, laissait le parc immobilier public à l’abandon, alors qu’il devait être transformé en logements sociaux.

TS+CC
Comment se passe la planification avant une occupation ? Est-ce que quelqu’un entre d’abord pour analyser le bâtiment ?

CS
Non. Mais aujourd’hui, pour certains bâtiments, on utilise une autre méthode. Par exemple, on a une technique avec un serrurier : on ouvre, une personne entre, jette un coup d’œil. On a aussi déjà fait semblant de vouloir acheter le bâtiment ; un agent immobilier vient alors avec nous pour faire une visite. Il y a plusieurs façons de procéder. Selon notre méthode, quand on décide d’occuper, on choisit le bâtiment, d’abord en fonction du temps qu’il est resté abandonné. On fait une recherche au registre foncier pour savoir qui est le propriétaire, s’il y a des dettes de taxes foncières (IPTU |21|), si le bien a déjà été exproprié ou s’il appartient à l’État… Ce genre de choses…

Ce qui est frappant, c’est qu’il y a toujours un élément de surprise, que ce soit en amont, lorsqu’on procède à cette recherche ou quand on occupe un bâtiment. On a occupé plusieurs bâtiments et chacun a révélé une surprise. Par exemple, le Cambridge |22| : quand on l’a occupé, on a ouvert le portail et, derrière, il y avait un mur en briques ! Là, ça complique tout. Quand on est arrivé au Cambridge, le bâtiment était une vraie bombe à retardement. L’électricité n’avait pas été entièrement coupée, il y avait plein de câbles épais sectionnés, des fils à nu… et le bâtiment était rempli d’eau. Imagine, si quelqu’un prend un choc ! Ou si un incendie se déclare ? Ou pire, une explosion ? L’État lui-même ne sait pas ce qu’il y a à l’intérieur de ces bâtiments, ni quels dangers ils recèlent. Et je ne parle même pas des pigeons ! Qui d’autre que le pigeon apporte autant de maladies en ville ? Il y a des foyers de maladies qu’on croyait éradiquées, comme la tuberculose ou la méningite, qui reviennent. Et il y a plein d’autres nuisibles urbains : les cafards, les scorpions, les termites… Tous ces fléaux sont bien vivants, notamment à cause de l’abandon de ces immeubles. Et la dengue aussi. Tout le monde parle de la dengue, mais est-ce que quelqu’un va vérifier les réservoirs d’eau de ces bâtiments abandonnés ?

TS+CC
Et comment s’est passé le jour de l’occupation en lui-même ? Comment s’est déroulé ce tout premier acte ?

CS
On rentre… Et chaque personne arrive déjà préparée : l’une avec une cuisinière, une autre avec une bouteille de gaz, une autre encore avec des casseroles – et toutes avec des aliments non périssables attachés autour de la taille : café, haricots, pâtes, sauce… Cette stratégie, c’est pour permettre aux gens de se maintenir à l’intérieur du bâtiment. Parce qu’on tient le peuple avec la nourriture, non ? Alors quand on entre, chacun arrive avec deux ou trois kilos d’aliments non périssables attachés à la taille, et aussi de l’eau : parce que la première chose que la police coupe, c’est l’accès à la nourriture.

Au début, tout le monde est agglutiné, rassemblé. On se répartit dans les grandes pièces. Souvent, ce sont les femmes d’un côté, les hommes de l’autre. Ensuite, il y a des équipes chargées de faire une inspection complète du bâtiment. Il faut vérifier où il faut boucher les trous, surtout les cages d’ascenseur qui peuvent être ouvertes, contrôler les réservoirs d’eau pour voir s’ils sont pleins et éliminer tous les risques de choc électrique. On ne peut pas tout de suite répartir les familles dans des espaces individuels – ça se fait plus tard.

Puis vient ce qu’on appelle le « choc de chaux », une pratique qu’on tient de nos savoirs ancestraux. Tout le monde sait que, dans le Nord-Est du Brésil, on utilise la chaux pour lutter contre le bacille de Koch |23|. Donc, avant de peindre, on passe de la chaux. Non seulement parce que c’est moins cher, mais aussi parce que c’est très efficace. Et ensuite, on commence à faire les améliorations possibles, petit à petit.

TS+CC
Comment vous organisez-vous initialement ?

CS
Quand on occupe, on met en place une organisation locale, divisée en commissions. On commence par identifier les besoins spécifiques du bâtiment. Dans le cas du bâtiment de l’avenue du 9 juillet, le lieu était fermé et on y trouvait encore des éléments d’origine : il y avait du marbre, un buste de Getúlio Vargas |24| et une portaria |25|, par laquelle on pouvait encore ouvrir la porte. On a fait des repérages pour voir comment on allait s’installer dans cet espace. Ensuite, on a réparti ces espaces entre les familles : les plus grandes familles dans les pièces plus vastes, les plus petites dans des espaces plus réduits. Et pendant un bon moment, on a fonctionné avec une cuisine communautaire. La portaria était très importante : il fallait qu’on sache qui entre et qui sort. Petit à petit, on a mis en place une forme d’organisation interne, autant que possible, avec les moyens du bord. [Aujourd’hui, l’entrée de l’occupation ne se fait plus par l’avenida 9 de Julho, mais par la rue Álvaro de Carvalho. Là, les habitants se relaient comme portiers, contrôlant strictement l’accès. Lorsqu’un invité arrive, le résident doit le rejoindre à la loge et l’accompagner à l’intérieur du bâtiment.]

TS+CC
Comment se passait l’accès au bâtiment au début de l’occupation, les allées et venues ? Et quelle est la relation avec la police dans le cadre des occupations ?

CS
La police, c’est toujours la première à arriver, n’est-ce pas ? [Au début d’une occupation,] on déclare toujours aux policiers : « Ce n’est pas une question de sécurité publique, c’est une question sociale ». Ce qu’on fait, c’est dénoncer un vide urbain. Je vais te dire : lors de la première occupation de la 9 de Julho – et aussi lors de la dernière, en 2016 – on est entrés alors que la police était déjà devant la porte. On n’a pas eu peur de reculer, tu vois ? Si tu regardes les vidéos de l’occupation de 2016, celle de l’ancien hôtel Cambridge, tu verras que la police était là, juste à côté de moi |26|. Je me tenais là, en train de dire qui entrait et qui n’entrait pas. Il y a un moment où j’ai dit à un policier : « Je vais vous respecter, Monsieur, et je vais dire que c’est bon, plus personne n’entre. Mais je fais ça par respect pour votre travail ». Une fois qu’on fait le boletim de ocorrência [le constat de police], plus personne n’a le droit d’entrer. Si quelqu’un sort, il ne peut plus rentrer. Du coup, on ne laisse jamais le bâtiment vide. On garde des gens à l’intérieur et d’autres à l’extérieur pour éviter que la police ne reprenne l’endroit. Après le dépôt du rapport, les premières 24 heures sont cruciales. C’est notre espoir de rester. Parce qu’après ce délai, on ne peut plus être expulsés qu’en vertu d’une reintegração de posse [procédure de restitution officielle de la propriété]. C’est alors qu’on commence à légitimer l’occupation, à montrer qu’on est organisés, qu’on reste pour vivre, pas pour provoquer.

TS+CC
Après le rapport de police, la police s’en va… et ensuite, c’est à la justice de jouer…

CS
C’est ça. À ce moment-là, le juge entre en scène, ainsi que le ou la propriétaire du bien. C’est alors que commencent les négociations. C’est pour ça que je dis que c’est à partir du dépôt du rapport de police que l’occupation commence à gagner en visibilité et en légitimité. La police militaire nous emmène au commissariat : là, on est officiellement inculpés. C’est ce qu’ils appellent une esbulho possessório [spoliation de propriété]. Pourtant, je te le dis, il n’y a absolument personne dans le bâtiment : tous ceux qu’on occupe sont vides. Mais ils ajoutent qu’il y a eu une ameaça de turbação [menace de trouble]. Comme si on avait menacé quelqu’un… Mais on menace qui ? Les mauvaises herbes ?!

TS+CC
Comment se passe la relation avec le voisinage ?

CS
À chaque fois qu’on a occupé un bâtiment, on a toujours cherché à se présenter au voisinage, à dire qui nous étions. Car même si notre lutte est légitime et juste, on a toujours été criminalisés. On nous traitait d’« envahisseurs »… à force, on finissait par s’isoler… C’est la raison pour laquelle, lors de l’occupation du 9 de Julho, on a écrit une lettre-manifeste, une lettre qu’on a distribuée aux habitants du quartier pour expliquer pourquoi on occupait ces lieux. Puis, les médias ont commencé à s’y intéresser et l’occupation a commencé à attirer l’attention. On est restés de 1997 à 2003 – c’était la première occupation. En 2003, le gouvernement de Marta Suplicy nous a contactés pour nous dire qu’il y avait une négociation en cours avec la Caixa Econômica Federal [la principale banque publique du pays]. Une résolution du président Fernando Henrique Cardoso prévoyait déjà que ce bâtiment devait entrer dans le cadre du Programme de Location Résidentielle (PAR). Des réunions ont été organisées avec la Caixa : on nous a présenté une projection de ce que cela impliquerait en termes de paiement et de contreparties. On a entamé des négociations. Le Gouvernement de Marta nous a proposé de quitter temporairement le bâtiment, avec la promesse que l’on pourrait y revenir en 2004, une fois qu’il serait réhabilité. Ce qui n’a jamais eu lieu. Ce fut un vrai leurre. Nous avons quitté les lieux. J’ai été la dernière à partir : je gardais le bâtiment en attendant que le président de l’époque – Carlos Eduardo Gabas, alors superintendant de l’INSS, futur ministre de la Prévoyance – y envoie des agents de sécurité. Tout le monde est parti avec une petite aide d’urgence de 300 réaux, censée servir à payer un loyer |27|… En 2009, nous avons réoccupé.

Entre-temps, en l’an 2000, nous avons fondé le MSTC – Mouvement des Sans-Toit du Centre. Il y avait des divergences avec le mouvement précédent. On a créé le MSTC avec une volonté d’ouverture, avec le désir de participer à d’autres mouvements nationaux, aux conseils municipaux, aux espaces de décision collective. On ne voulait pas être un mouvement fermé ou sectaire. On voulait faire du lobbying, de l’advocacy, dialoguer avec les pouvoirs publics, les universités, les acteurs culturels.

En 2009, on a réoccupé la 9 de Julho, mais avec une autre approche. C’était une dénonciation : le bâtiment était toujours vide et abandonné. On est sortis, mais en 2010, on est revenus. On est restés un certain temps, on a nettoyé tout le bâtiment, puis on a de nouveau été expulsés. En 2016, on est revenus, mais avec une autre structure. Cette fois, d’autres acteurs étaient à nos côtés et nous appuyaient ; on avait aussi une assistance technique, un projet d’occupation. On a occupé le bâtiment avec l’aide du secteur de la culture, avec les médias, l’éducation et la santé. La première chose qu’on a faite, c’est ouvrir les portes à la société civile. En plus de la lettre pour les voisins, on est arrivés avec un projet en main, accompagnés par une assistance technique. On a interpellé le CAU |28| et les Facultés d’architecture en disant que le mouvement avait besoin d’une assistance technique d’intérêt social. Parce que nous, on a notre propre entreprise d’« architecture insurgée » : on a des maçons, des électriciens, des plombiers… mais on n’a pas de RT |29|, et il nous fallait cette légitimité technique. L’institut Peabiru |30| a accepté de nous accompagner. Ça a fait du bruit à l’époque : « Quoi ? Une assistance technique dans une occupation ? » Mais on a vu que ça marchait. On a même invité le SUS |31| (à l’époque dirigée par [Alexandre] Padilha, actuellement ministre de la santé). On leur a proposé d’intégrer la santé aux bâtiments occupés. On leur a proposé que les agents de santé et les médecins viennent dans les occupations pour proposer un accompagnement médical préventif, et non attendre que les gens tombent malades. C’était une nouvelle façon de penser la santé populaire. [L’espace extérieur de l’occupation comprend des zones de loisirs et un potager biologique pour les habitants. Dans la cour, des marchés ouverts, des événements et des fêtes sont organisés. L’entrée du bâtiment se fait aujourd’hui par la rue Álvaro de Carvalho, située au-dessus du niveau de l’avenida 9 de Julho, et reliée par un pont d’accès. À cet étage, on trouve une cuisine collective, une bibliothèque, une ludothèque, des espaces pour enfants, un atelier de couture, une menuiserie, des bureaux, et une boutique du MSTC. Au rez-de-chaussée (au niveau de l’avenida 9 de Julho), il y a une galerie d’art ouverte au public. Et dans les étages supérieurs, sont développés des projets comme un théâtre et des résidences artistiques].

TEMPS II – RÉFLEXION

TS+CC
Après toutes ces années, qu’est-ce qui t’a surprise positivement ? Peux-tu évoquer une chose que tu pensais impossible et qui a pourtant fonctionné ?

CS
Ce qui nous a vraiment surpris·e·s positivement, c’est quand nous avons cessé d’avoir peur d’ouvrir les portes à la société. À l’époque, on m’a traitée de folle. Quand j’ai invité les médias pour annoncer qu’on allait occuper, quand j’ai fait appel au milieu universitaire, à une assistance technique pour concevoir un projet d’occupation du bâtiment, quand j’ai invité des professionnels de la santé, quand j’ai ouvert nos portes à la culture… c’était une véritable rupture de paradigme. Mais dans cette rupture, on a pu montrer que nous étions des sujets de droit. Davantage : nous sommes des citoyens de plein droit, des gens ordinaires que l’État doit reconnaître – sans passer par l’assistanat. Et ça, je le dis haut et fort : le mouvement ne travaille pas dans l’assistanat, mais dans ce que j’appelle l’éducation citoyenne. Nous formons des citoyens ayant conscience de leurs droits, mais aussi de leurs devoirs envers l’Etat et la société. L’État doit le comprendre.

TS+CC
Et est-ce que le projet de la 9 de Julho reste un modèle ? Y a-t-il des choses que vous auriez faites autrement ? Est-ce que vous pensez déjà à d’autres modèles ?

CS
Pour moi, le 9 de Julho est un modèle parce que nous le transformons chaque jour. En ce moment même, nous sommes en train de construire un cinéma et un théâtre. On vient d’installer une ludothèque et une bibliothèque, avec une résidence artistique et architecturale. On a cette capacité d’évolution et on améliore sans cesse le modèle en écoutant aussi les autres. Par exemple, nous développons aujourd’hui un projet environnemental à l’intérieur même du 9 de Julho. Nous avons reconnu les arbres présents depuis notre première occupation, en 1997 – ils ont au moins 40 ou 50 ans. Ce n’est pas juste de les maltraiter. Nous essayons de déterminer si une source d’eau passe sous le bâtiment ou si c’est la continuité d’une rivière urbaine. Aujourd’hui, on a aussi un potager urbain qui alimente des familles. Il y a, à l’intérieur du bâtiment, des arbres natifs du biome de la Mata Atlântica [Forêt Atlantique] et on s’est engagés dans leur préservation. Dans ce contexte de durabilité, on a mis en place un très grand compost pour les déchets de la cuisine collective. On a maintenant des partenariats avec le programme Sampa+Rural |32| de la mairie. Des gens du programme Pode Entrar |33| – un programme municipal – travaillent dans notre potager.

Donc, pour répondre à votre question, ce qu’on aurait pu faire autrement, on le fait aujourd’hui, chaque jour. On est en constante transformation.

TS+CC
C’est donc un modèle en constante évolution… Un modèle qu’on peut continuellement mettre à jour ?

CS
C’est exactement ça. C’est la vie et c’est cette dynamique constante du faire, du construire ensemble qui fonctionne. De cette façon, on garde le collectif toujours actif, toujours vivant. On porte plusieurs projets en parallèle. Aujourd’hui, en plus du travail avec l’assistance technique, on mène aussi un travail technique et social. L’écoute des habitants est indispensable. On a une assistante sociale, des partenariats avec des psychologues, et aussi avec plusieurs universités, y compris pour l’octroi de bourses d’études. On ne vit d’ailleurs pas ces partenariats avec l’université comme le fait d’être un simple objet de recherche : nous aussi, nous sommes des chercheurs, nous sommes sur le terrain, nous aussi on est en première ligne. On a plein d’initiatives, comme des cours de broderie, des projets pour lutter contre la faim, pour renforcer la souveraineté alimentaire, pour enseigner aux gens à entreprendre à partir de ce qu’ils et elles savent déjà – avec leur savoir-faire ancestral. Par exemple, la technique du « choc de chaux » dont j’ai déjà parlé : c’est très simple, dans le Nord-Est du Brésil, on l’utilisait déjà il y a 50 ou 60 ans. Qui ici aurait pensé à faire ça ? Ce sont des techniques simples, ancestrales, mais efficaces, et elles donnent des résultats. Dans tous nos projets, on réfléchit non seulement au bien-être des personnes, mais aussi à la durabilité. Et on continue sans relâche, parce que c’est ça, le rôle d’une personne en position de leadership : faire du lobbying, de l’advocacy.

TS+CC
Comment cette dynamique de transformation influence-t-elle la gestion de l’espace ? Comment les décisions de gestion sont-elles prises ?

CS
La gestion fonctionne de la manière suivante : nous avons les statuts du mouvement, repris dans un texte qui est notre document de référence. Mais à l’intérieur de chaque occupation, nous avons aussi un règlement intérieur, qui organise la vie en communauté. Chaque occupation a son coordinateur ou sa coordinatrice et chaque étage a ses médiateurs, qui sont les habitants eux-mêmes. Tous les trois mois, on organise une rotation de ces rôles pour garantir que tout le monde puisse participer. Ces médiateurs transmettent les propositions du mouvement : les améliorations prévues, les projets à venir, les devis, etc., et font un retour aux habitants. On a aussi une équipe administrative qui s’occupe des documents ainsi qu’un service social, juridique et comptable. Les assistantes sociales sont responsables du suivi de tous les dossiers : l’enregistrement au CRAS [Centre de référence d’assistance sociale], au NISS [numéro d’identification sociale], au CadÚnico |34|, au registre de la COHAB |35|, etc. Elles aident les familles à préparer les documents pour qu’elles puissent accéder aux programmes de logement social et bénéficier d’autres accompagnements. Les décisions importantes sont prises lors des assemblées générales ordinaires, toujours à des dates prévues. Pour qu’une décision soit validée, au moins 51 % des habitants doivent participer.

TS+CC
Quand tu regardes en arrière, y a-t-il quelque chose que tu pensais réussir et qui n’a pas marché ?

CS
Je ne sais pas… Chaque leader a sa façon de faire. Moi, je n’ai jamais été du genre à abandonner. Mais il y a quelque chose qu’on n’a pas encore totalement résolu, c’est le problème des personnes qui ne participent pas ou qui ne contribuent pas. Pas seulement financièrement, mais aussi dans la vie collective. Cela dit, avec notre système de points, basé sur la participation, ces personnes sont pénalisées : tout ce que nous obtenons est partagé entre celles et ceux qui participent activement. [Les personnes qui ne contribuent pas ou ne participent pas ne sont pas sanctionnées par des amendes ni expulsées. Leur pénalité est une perte de priorité dans les bénéfices et projets internes.]
Moi, j’ai toujours eu cette conviction-là : j’ai déjà fait une réunion de base sous un arbre, avec deux personnes seulement. Je n’ai jamais abandonné. J’ai déjà lancé des projets avec une ou deux personnes. Parce que je crois que, s’il y en a une qui écoute, cette personne peut devenir un multiplicateur.

TS+CC
Tu penses que vivre dans une occupation change une personne ?

CS
Oui, ça change. Peut-être qu’elle ne gardera pas ce savoir avec elle, qu’elle l’oubliera un jour… mais elle change, forcément. Parce qu’elle va vivre dans un collectif, une vraie vie communautaire. Elle va devoir faire des tâches collectives, comme le nettoyage des étages. Chez elle, elle est libre. Mais dans les espaces communs, c’est le collectif qui compte. Et tout ça, ce n’est pas imposé d’en haut : ce règlement intérieur, ce sont les habitants qui l’ont construit ensemble. C’est ça l’essentiel : construire ensemble. Et quand quelqu’un ne fait rien, ça gêne les autres. Il y a une sorte de pression naturelle, parce que tout le monde participe – alors celui qui ne fait rien, il dérange.

TEMPS III HABITER

TS+CC
Quel est l’avenir des occupations comme forme de production du logement ?

CS
L’avenir des occupations, d’une certaine manière, c’est toujours la même chose : un gestionnaire public cherche à réintégrer le bâtiment. Ça, on n’y échappe pas. Mais ce qu’on doit faire, c’est rompre avec les [vieux] paradigmes et proposer des solutions concrètes. Dans ma gestion au sein du MSTC, je n’ai jamais cessé d’apporter des propositions pour résoudre la question du logement – même au gouvernement lui-même. Malheureusement, l’avenir du logement au Brésil, ce sont des villes de plus en plus vides, sans sentiment d’appartenance, sans retour pour les territoires, et de plus en plus livrées à l’Airbnb. Le monde entier s’en rend compte. Prenons l’exemple de Pinheiros |36| : autrefois un quartier à échelle humaine, aujourd’hui rempli de tours vides. À 20h, aucune lumière allumée. Pas de sécurité, pas de vie. Si le commerce et la culture ne tenaient pas encore un peu, ce quartier serait mort. Ce qu’il faut, c’est que les gestionnaires arrêtent d’être têtus et qu’ils comprennent qu’il faut travailler les quartiers, les territoires. Quand ils comprendront que l’urbanisme social est la clé pour bâtir des villes justes, alors oui, on pourra construire des villes compactes, inclusives. Et à São Paulo, c’est possible ! La ville a 32 sous-préfectures, chacune avec ses districts. Si on travaille à l’échelle du district, on peut refaire la ville depuis la base.

TS+CC
Dans les 15 prochaines années, penses-tu que la stratégie d’occupation va s’intensifier ?

CS
Elle pourrait être beaucoup plus puissante si les mouvements sociaux parvenaient à trouver un équilibre avec le pouvoir public et le secteur privé. Mais malheureusement, il existe encore des groupes sectaires, et des organisations qui poursuivent des objectifs opportunistes, sans conscience collective.

Et il y a aussi des milices de grilagem |37| qui exploitent les plus vulnérables. La ville grandit de manière désordonnée, sans densification intelligente. L’urbanisation part vers les marges, vers des terrains souvent grillagés. Si tu vas vers les périphéries, tu verras des projets comme ceux du CDHU ou du programme Pode Entrar, avec 3 000, 4 000 unités en construction. Mais pour qui ? Je suis passée par Cotia |38|, j’ai vu des tours pousser. Idem en zone est, en zone sud… Mais où est l’emploi ? Le transport ? Où sont les équipements publics ?

TS+CC
Est-ce une mauvaise solution ?

CS
Oui. C’est mal pensé, mal planifié. On déplace des milliers de familles dans des zones sans infrastructures : pas d’emploi, pas de crèche, pas d’école, pas d’UBS (centres de santé). C’est une bombe à retardement. [Carmen souligne ici que la majorité des logements sociaux sont construits dans des périphéries isolées, sans infrastructure suffisante.]

TS+CC
Comment vois-tu l’avenir du MSTC ?

CS
Le MSTC adopte une position claire : notre ordre, c’est le désordre du système. On est de plus en plus préparés à participer aux programmes publics, comme Minha Casa Minha Vida |39|, Pode Entrar, en cherchant aussi des partenariats avec le secteur privé. Certaines entreprises ont déjà compris que le logement ne peut pas être réduit au marché.

TS+CC
L’avenir du mouvement passe-t-il par la professionnalisation, l’engagement et le plaidoyer ?

CS
Je ne parlerais pas de professionnalisation, parce qu’on est en apprentissage constant. Chaque personne qui arrive a quelque chose à transmettre. Mais oui, on se prépare pour éviter que les familles vivent 20, 30 ans dans une occupation et finissent expulsées sans rien. On veut créer de véritables unités de logement, mais toujours avec une logique de territoire : des transports, une UBS, un marché, même une loterie pour payer les factures. C’est pour ça qu’on lutte pour rester au centre, là où tout existe déjà.

TS+CC
Le MSTC agit donc comme un nouvel acteur dans la négociation pour le logement ?

CS
Exactement. Et dans le dialogue. On conçoit des projets de bâtiments sans garage, avec des façades actives |40| pour aider à soutenir économiquement les copropriétés. On ne veut pas reproduire la domination de la voiture. Il faut sortir de cette « voiturocratie ». Le citoyen doit retrouver une vraie mobilité.

TS+CC
Avec ta vision de la ville, qu’est-ce que les futurs architectes devraient étudier pour contribuer à l’avenir du logement ?

CS
La première chose que l’architecte doit faire est de connaître la ville. La première chose, c’est la connaissance du territoire. Il ne sert à rien de concevoir des bâtiments sans parler avec ceux qui vivent sur le site ou sans connaître la localité. Quand il commence à connaître réellement la ville, l’architecte comprend qu’il n’est pas [seulement] un designer. Qu’il est en fait un urbaniste. Que l’architecture est vie. Alors, il peut concevoir une vision d’une ville meilleure.

TS+CC
La ville entre dans l’édifice…

CS
C’est nécessaire. Il faut étudier la forme architecturale depuis l’intérieur. Comment ces familles vont-elles vivre à l’intérieur ? Quel bien-être auront-elles ? Quelle sera leur qualité de vie ? Comment concevoir le projet de manière juste… non ?

Pour suivre l’actualité du 9 de Julho, vous pouvez consulter la page Instagram de la « Cuisine » de l’Occupation du 9 de Julho : @cozinhaocupacao9dejulho.

|1| NDLR : à São Paulo, métropole de plus de 12 millions d’habitants, 360 000 familles, soit 1,2 million de personnes vivant en situation de précarité et 170 000 habitants sont en attente de logement social. Voir De Langenhagen, S., « Dans un immeuble de São Paulo, un modèle de vivre-ensemble », Solidarium, 2022, [en ligne], https://www.solidarum.org/vivre-ensemble/dans-immeuble-de-sao-paulo-modele-de-vivre-ensemble.

|2| Le film, réalisé par Eliane Caffé, mêle fiction avec des scènes réelles d’occupation et des scènes de confrontation directe avec la police.

|3| Associação Paulista de Críticos de Arte : l’Association des critiques d’art de São Paulo récompense différentes catégories artistiques à travers un prix annuel depuis 1972 ; leur site internet peut être consulté à l’adresse suivante : https://apca.org.br/, ndlr.

|4| Le prix ECOA soutient les initiatives de transformation sociale au Brésil, dans la lignée thématique du portail ECOA, une branche du géant médiatique lusophone Universo Online (UOL), ndlr.

|5| Institut d’enseignement supérieur privé de niveau universitaire, principalement dédié à l’ingéniérie et l’administration des affaires, de renommée internationale – voir https://www.insper.edu.br/en/home ; L’Escola da Cidade est un établissement universitaire d’architecture et d’urbanisme https://escoladacidade.edu.br/.

|6| Mutirão (pluriel : mutirões) est un terme brésilien (du tupi motyrõ, « travail en commun » – voir https://wikifavelas.com.br/index.php/Mutirão), désignant une mobilisation de personnes, généralement à titre bénévole, pour accomplir une tâche au bénéfice d’une communauté. À l’origine, ce terme s’appliquait aux travaux agricoles ou à la construction de logements populaires, où les participants s’entraidaient selon un système de rotation sans hiérarchie. Aujourd’hui, par extension, il peut désigner toute initiative collective visant à réaliser un service non rémunéré, comme la peinture d’une école ou le nettoyage d’un parc. NDLR : Carmen Silva fait ici référence à des mutirões organisés pour construire des logements publics à loyer modéré, à l’initiative de Luiza Erundina (née en 1934), ancienne maire de São Paulo et aujourd’hui députée du PSOL. (https://psol50.org.br/luiza-erundina-a-mulher-que-nao-foge-a-luta-assume-mais-um-mandato-de-deputada-federal/).

|7| Le projet Cingapura est un programme d’urbanisation de la favela par la construction de logements sociaux, initié à São Paulo dans les années 1990 ; le nom du projet fait référence à la ville de Singapour, prise pour modèle, où 80 % des habitants occupent des logements sociaux (voir https://habitat-world-map.org/pays/asie/singapour/).

|8| « Le pays du crack », ndlr.

|9| Ici, une grande demeure urbaine, ndlr ; il sagit du casarão da alameda Cleveland, qui appartenait à la famille Santos Dumont, célèbre par la figure d’Alberto S.D. un pionnier de l’aéronautique au XIXe siècle.

|10| En 2001.

|11| Ce projet de 486 logements richement dotés en services urbains a été finalisé en 2020 (voir ici : https://capital.sp.gov.br/web/se/w/noticias/106064), ndlr. Pour plus de détails sur l’évolution du projet et l’intégration progressive des zones d’habitat pré-existantes et des favelas adjacentes, voir ici : http://www.observatorioderemocoes.fau.usp.br/index.html.

|12| COHAB – Compagnie Métropolitaine de Logement de São Paulo est une entreprise publique de politiques publiques du logement dans la ville de São Paulo et sa région métropolitaine, ndlr.

|13| Société de développement urbain et du logement de l’État de São Paulo.

|14| Programme d’accélération de la croissance – Banque interaméricaine de développement. NDLR : les cortiços sont des logements urbains rudimentaires typiques du Brésil habités par des populations paupérisées, voir ici : https://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/cortico.

|15| Institut de retraite et pension des travailleurs du transport de marchandises.

|16| Institut national de sécurité sociale.

|17| Président du Brésil de 1997 à 2003.

|18| Maire de São Paulo de 1997 à 2000.

|19| Gouverneur de l’État de São Paulo de 1995 à 2001.

|20| Gouverneur de l’État de São Paulo de 1987 à 1991.

|21| Imposto Predial e Territorial Urbano, sorte d’impôt foncier et immobilier dû au Service des finances municipales.

|22| L’ancien hôtel Cambridge a été occupé par le MSTC en 2012, après huit ans d’abandon. Il abrite actuellement environ 170 familles.

|23| Le bacille de Koch est une bactérie responsable de la tuberculose.

|24| Getúlio Vargas (1882-1954) : homme politique brésilien, président du Brésil à deux reprises, figure majeure de l’histoire politique du XXe siècle. Il est souvent représenté dans des bâtiments publics anciens.

|25| Portaria : espace typique des immeubles brésiliens où se trouve le ou la concierge, servant de point de contrôle et d’accueil.

|26| Le film Era o Hotel Cambridge, qui évoque l’occupation par le MST de l’ancien hôtel Cambridge, montre des exemples de scènes réelles de la confrontation avec la police.

|27| Le salaire minimum fédéral en 2004 était de R$240,00 (≈ 64 euros au taux de l’époque). R$300,00 équivaudrait à 3 mois de loyer.

|28| CAU : Conseil d’Architecture et d’Urbanisme du Brésil.

|29| RT (Registro de Responsabilidade Técnica) : enregistrement obligatoire au Brésil qui identifie le professionnel responsable pour les travaux techniques.

|30| Peabiru : ONG brésilienne qui propose notamment des projets d’assistance technique pour des initiatives sociales, comme les occupations urbaines.

|31| Sistema Único de Saúde, service public de la santé.

|32| Sampa est le petit nom de São Paulo : le projet Sampa+Rural vise à promouvoir les initiatives locales associant agriculture, tourisme et alimentation saine.

|33| Pode Entrar : programme de la mairie de São Paulo visant à promouvoir l’accès au logement pour les populations vulnérables à travers l’inclusion et l’appui à des projets sociaux ou urbains.

|34| CadÚnico est un outil de collecte de données et d’informations du gouvernement brésilien qui vise à identifier toutes les familles à faibles revenus et à les inclure dans des programmes d’assistance sociale et de redistribution des revenus.

|35| COHAB SP, Companhia de Habitação do Estado de São Paulo, institution publique qui a pour but de promouvoir l’accès à un logement digne pour les populations à faible revenu.

|36| Quartier huppé de São Paulo.

|37| Au Brésil, grilagem signifie le pillage des terres et l’appropriation illégale de terres et de propriétés. Le terme désigne également la vente frauduleuse de terres, appartenant aux pouvoirs publics ou au secteur privé, par falsification des documents de propriété. Dans ce cas, Carmen décrit la vente irrégulière de terres et de propriétés aux couches les plus pauvres de la population.

|38| Cotia est une petite ville brésilienne de l’État de São Paulo, située à une trentaine de kilomètres à l’ouest du centre de São Paulo.

|39| Programme de soutien à l’accès à un logement digne et à la propriété pour les personnes à faible revenu mis en place par Lula en 2009.

|40| La façade active est le terme utilisé pour définir les points commerciaux au rez-de-chaussée des bâtiments.

Pour citer cet article

Tavares Abranches De Soveral T., « Occuper l’architecture, entretien avec Carmen Silva », in Dérivations, numéro 10, septembre 2025, pp. 145-165. ISSN : 2466-5983.
URL : https://derivations.be/numeros/numero-10/occuper-l-architecture.html

Vous pouvez acheter ce numéro en ligne ou en librairie.

Participer à la discussion

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.